France Adot

Très liée à mon grand frère

grand frère

Notre histoire n’a rien d’exceptionnelle …

C’était simplement une évidence qui par bonheur a pu se réaliser.
Alain est mon grand frère, mon aîné de 10 ans. Mais il est également le grand frère de Jo, le fils de papa et maman, le mari de Pascale et le papa de Stéphane, Sébastien et Océane.
Il est aussi le beau-frère, le cousin, le voisin, le collègue … et l’ami de bien d’autres personnes.

De mes souvenirs d’enfant, Alain est notre grand frère, oui mais un grand frère atteint d’une maladie qui l’oblige à avoir des règles de vie. Il se doit, entre autres, de respecter les horaires de repas … Durant de nombreuses années, pour ma part je n’ai vu que cela … ; le respect des horaires de repas et ses petits déjeuners colossaux.

Notre famille est aimante mais sans démonstration débordante. Nous nous aimons et nous nous respectons sans presque pas nous le dire … Nous le savons, nous agissons sans le dire davantage en toute discrétion.

La vie s’est déroulée normalement, sans qu’Alain nous fasse ressentir les contraintes de cette maladie. Pascale a aussi longtemps assumé en silence les contraintes des malaises …

Puis tout s’est dégradé …

Nous sommes passés d’une vie paisible à une inquiétude constante pour Alain.

Inquiétude pour ses malaises, inquiétude pour ses pertes de repère puis l’hospitalisation et le diagnostic qui tarde à arriver… nous savions tous ce qu’il n’avait pas, mais nous ne savions pas ce qu’il avait. Paradoxal, non ?

Une fois le diagnostic établi, rapidement nous avons su qu’il n’y avait qu’une seule issue, la greffe de rein.

Pour ma part, j’ai beaucoup pris de renseignements auprès du centre des donneurs de sang de Bourg en Bresse.

J’ai fait part à mon grand frère de mon souhait de lui donner un de mes reins. C’était plus de deux ans avant l’intervention mais pour lui il était impensable que je risque … Mais au fait Alain que je risque QUOI !!

Bien sûr je le comprenais, prendre le risque de mettre ma vie en danger pour lui c’était inconcevable. Mais le temps passait et son état se dégradait.

La décision

La décision a enfin été prise, faute de donneurs décédés mais surtout Alain n’était plus prioritaire sur les listes d’attente.

Les premiers examens ont commencé à deux, avec Jo. Rapidement il n’est resté que moi …

Mais les examens ce n’est rien, même si le rythme était très soutenu … Chaque nouvel examen ne pouvait être réalisé que si celui fait 15 jours auparavant avait été validé par la commission des médecins … Ce qui était rassurant c’est que plus j’avançais dans le protocole, plus j’avais la confirmation que j’étais en pleine forme. C’est cela ma grande chance.

A chaque déplacement à Lyon à l’hôpital Edouard Herriot, nous formions un binôme avec Alain. Jamais il ne m’aurait laissé y aller seule. De nombreux rendez-vous, confirmation de résultats étaient fait en commun, en toute transparence.

Ces séjours à l’hôpital m’ont appris autre chose … le courage des malades, leurs volontés d’affronter, de se battre, leur détermination, la capacité qu’ils ont de ne garder que le positif.

Et pendant tout ce temps, la famille est là, autour de nous discrètement.

Le don et la greffe

Le jour de l’opération arrive. Je sais qu’Alain est très inquiet pour moi, surtout que le dernier rendez-vous avec le docteur BADEZ n’a pas été là pour le rassurer. Il nous a expliqué que je risquais d’être très fatiguée après l’intervention, le temps que mon autre rein prenne le relais. Il a aussi souligné que pour Alain ce serait le contraire si l’opération était réussie.

Je me souviens de tout, nos regards avec Alain avant l’opération, les odeurs, les bruits, même les visages dans la salle d’opération. Puis le réveil, Alain est là à côté, je l’entends mais je n’arrive pas à parler sous l’effet de l’anesthésie.

J’entends autour de moi le personnel qui me parle de la pompe à morphine. « Il ne faut pas avoir mal » … mais je n’ai pas mal … je n’ai jamais eu mal.

Ils sont admirables les infirmiers et infirmières, je ne me suis jamais sentie délaissée, bien au contraire.

Je vais bien, même si je ne ferais pas un marathon, si bien que je surprends le monde médical car je n’ai pratiquement pas utilisé la pompe à morphine.

J’ai Alain au téléphone, je le rassure, mais pour lui, c’est compliqué. J’ai peur du rejet. La famille nous entoure d’affection, nos parents, mon Phiphi, Jo, Pascale, nos enfants … tous sont là.

L’opération a eu lieu le lundi, le jeudi je n’y tiens plus j’ai envie de voir Alain. Je me sens suffisamment en forme pour aller le voir.

Et là … c’est indescriptible … qu’est-ce que nous avons « pleuré » tous les deux à ce moment-là, des larmes de joie, des larmes de soulagement, des larmes de victoire aussi.

La vie d’aujourd’hui

Ce sont ces moments intenses qui soudent une famille, car sans les uns et les autres rien n’était possible, chacun a son rôle …

Aujourd’hui je dirais que tout a continué, nous sommes tous toujours aussi unis, il y a eu d’autres blessures mais je vais formidablement bien et la vie reste Belle.

Aujourd’hui Alain est là pour nous tous, pour beaucoup d’entre vous aussi. Mais notre grande joie, il est surtout là pour Aditya, Julia, Raphael et …. Ce n’est certainement pas fini.

Notre histoire n’a rien d’exceptionnelle, c’était simplement une évidence qui par bonheur a pu se réaliser.

Dominique, ADOT01, octobre 2020

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