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La carte de donneur d’organes : un manifeste de volonté

La carte de donneur d'organes

La carte de donneur : un engagement fort

Daniel MAROUDY * – Novembre 2016

A l’heure où des jusqu‘au-boutistes du consentement présumé disent, soi-disant, vouloir épargner une souffrance aux familles, en les excluant de la décision du don d’organes de leur proche décédé, d’autres ou les mêmes dévalorisent ou rejettent le bien-fondé de la carte de donneur. Ces derniers dénient, en quelque sorte, à ceux qui la portent l’expression et la validité de leur consentement. On le ressent ainsi. On n’aura jamais  autant  fait de tords  à  cette  belle et nécessaire  disposition humaine qu’est l’assentiment au don d’organes.
C’est une grave erreur de déprécier le rôle et l’utilité de la carte de donneur d’organes. Elle n’a pas de valeur juridique, nous  dit-on !  Et alors !   C’est une manifestation de volonté !
Que peut-on  de mieux ou de plus  pour la morale et  l’éthique  d’un don d’organes ?  La loi ne fait-elle pas de la volonté du défunt la condition du don ? La carte en est l’expression manifeste. La supposition d’un consentement vaut-elle mieux que sa preuve ? La parole de la famille est-elle si irremplaçable au point de rendre nulle et non avenue celle écrite de la main du défunt ? La carte, n’est-ce pas une garantie patente, et une sacrée aide à la décision pour la coordination hospitalière ?

Prendre et porter une carte de donneur d’organes est un choix philosophique, un fait de conviction, le témoignage d’une grandeur d’âme. C’est aussi un acte quasi testamentaire, par lequel on décide du devenir de sa dépouille après la mort et que la morale et les bonnes mœurs engagent les vivants à respecter. Cette carte est un engagement, une certaine idée de soi, de l’autre, de l’humanité.
Déprécier la carte de donneur d’organes, c’est disqualifier l’esprit, les vertus et la volonté dont elle témoigne. Quiconque cherche à s’en affranchir, à récuser ce mode d’expression ou sa valeur, porte cruellement atteinte à la mémoire du défunt. Mais pas seulement. Cette carte est aussi un plaidoyer pour une cause. Son rejet ou son dénigrement est un affaiblissement pour le don d’organes.

La carte de donneur : un choix à respecter

A défaut d’un propos verbalisé, la présence d’une carte de donneur fait preuve des volontés du défunt pour la famille. Là où la croyance au consentement présumé se dérobe, la carte peut convaincre. Pour des proches hésitants, désemparés face à la terrible question du choix du défunt, la carte est déterminante. Elle supprime l’incertitude, le stress de la décision, le sentiment de culpabilité, les remords. La carte de donneur est un lieu d’assurance, une garantie, un motif d’apaisement pour la mémoire. Elle évite ou réduit les disputes familiales. Elle permet aussi une tranquillité existentielle et mémorielle ; on se met  en paix avec le mort en exauçant ses volontés.
De même, pour les coordinations hospitalières, la présence de cette attestation de volontés trouvée sur le défunt ou signalée par un proche, libère de la problématique du consentement présumé au profit d’un dialogue fondé sur un don explicite et consentit, telle  que l’éthique et  la morale du don l’envisagent. La carte de donneur a une fonction opérationnelle, libératrice et sécurisante pour l’équipe de coordination et notamment dans ses préoccupations de conscience. C’est avec un esprit dégagé, serein, sans émotion négative que le prélèvement des organes est assumé et s’inscrit valablement dans l’expérience professionnelle heureuse.

Faire connaitre sa position

On peut s’étonner de ce dédain que certains réservent à la carte de donneur d’organes et du déni juridique brandi pour en réduire la portée et les vertus, alors que les services de l’Etat ne partagent pas cet obscur discours. Quand la direction de l’information légale et administrative sous la tutelle du premier ministre aborde la question du don d’organes en 2014, elle préconise avec netteté « de faire connaître de son vivant sa position grâce à la carte de donneur d’organes » [1].  Au sommet de l’Etat en France, la carte de donneur d’organes est reconnue et conseillée pour sa fonction indicative de position en faveur du don.
Il est temps de le faire savoir et  de reconnaître à cette carte sa valeur probante et ses multiples mérites.
Notre propos ne met jamais en cause la présomption de consentement dans son approche humaniste, civilisée, raisonnable, et dès lors justifiée. Mais à faire du consentement présumé un dogme absolu bouscule fondamentalement notre anthropologie et crée des résistances au don d’organes.

Il nous parait plus intelligent et plus recevable, pour des familles endeuillées et en pleine souffrance, de privilégier d’autres voies que le bras armé de la loi pour réduire les refus.
Certes pas seulement, mais notamment en réservant à la carte de donneur un accueil plus favorable, un intérêt plus élevé.
Elle est  une indication de volonté dont l’évidence, le sens et la force sont des arguments inégalables et décisifs pour le cheminement de l’entretien avec les proches du défunt. Par endroits, la carte de donneur comme preuve de position favorable, permet à la coordination de décider du prélèvement des organes là où le consentement présumé est reçu comme une souffrance pour la mémoire.
Ce précieux document doit  être promu et servir à développer démocratiquement la culture et l’assentiment en faveur du don d’organes. Elle est de nature à réduire les refus de don par des effets d’engagement, de dynamique sociale et intra familiale, d’aide à la décision  à l’hôpital.

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[1]  https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F18515

Consulté le 7 novembre 2016
* Cadre supérieur infirmier d’anesthésie réanimation – ex coordinateur hospitalier pour le don d’organes (Paris … CHU Saint Louis-Lariboisière).
Auteur du livre :  » Don d’organes en situation de mort encéphalique. Entretien avec les familles  » – 2014 – Elsevier–Masson – 262 pages
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