Parce qu’il avait sa carte de donneur !
Je m’appelle Elodie. J’ai 50 ans, je suis maman de deux enfants, Juliette et Alexandre. Pendant 28 ans j’ai vécu avec un homme extraordinaire. Notre relation était fusionnelle. Puis un jour tout a basculé …
Alain était ambulancier, régulateur dans une petite entreprise. Il n’a jamais compté ses heures, ni pour ses clients ni pour ses collègues. Mais un jour il a sombré dans un burn-out terrible. Il a lutté pendant deux ans pour en sortir mais son combat s’est terminé en octobre 2017. Sa maladie a gagné et n’en pouvant plus il a mis fin à ses jours.
La matinée avait pourtant bien commencé, nous étions tous les deux. Alain s’était levé tôt comme à son habitude et vers 9 h15 il m’a monté un café au lit, m’a offert un énorme bouquet de roses en me disant qu’il m’aimait, qu’il y avait longtemps qu’il ne m’avait pas offert de fleurs et que tout allait changer, qu’une page allait se tourner !
Vers 12 h15, alors qu’il s’était endormi devant la télé, je ne l’ai plus entendu. Je suis allée près de lui et j’ai vu tout de suite qu’il était en arrêt cardio-respiratoire. Je l’ai soulevé de son fauteuil, mis sur le sol et j’ai commencé une réanimation en appelant le 15. En attendant les pompiers et le SMUR, j’ai continué le massage, puis les secours sont arrivés. Pendant près de 45 min je les ai vus faire tout ce qui était humainement possible pour sauver Alain. Quand son cœur est reparti, je savais que l’homme de ma vie ne reviendrait jamais, son cerveau ne réagissait plus.
Au Centre Hospitalier de Beuvry où il a été emmené, on m’a confirmé qu’il n’avait plus ses réflexes. J’ai tout doucement préparé mes enfants au pire.
Alain a été déclaré en mort cérébrale en fin de journée à l’âge de 49 ans. Le médecin est venu nous confirmer ce que nous savions déjà. Avec elle il y avait deux infirmières de la coordination des dons d’organes. Elles n’ont pas eu besoin de parler : j’ai sorti le portefeuille d’Alain et leur ai remis sa carte de donneur. Mes enfants n’ont pas été surpris car nous en avions parlé ensemble quelques années auparavant.
Mais la famille d’Alain a tout de suite manifesté son opposition.
C’était sa volonté pas la leur ! Heureusement qu’il avait sa carte et que nous connaissions sa position, sinon il n’y aurait pas eu de prélèvement …
Les infirmières m’ont informée de l’évolution de l’intervention et ont pris soin de l’amour de ma vie. Les médecins n’ont pu prélever que ses reins.
Je suis fière de lui
Alain a vécu toute sa vie pour les autres, et au-delà de la mort il a continué à vivre. Je suis fière de lui et je sais que quelque part il a aidé deux personnes à reprendre une vie normale. Tout ce que je souhaite c’est que ces gens prennent soin du cadeau qu’ils ont reçu et que quelquefois ils aient une toute petite pensée pour lui …
Il y a 17 mois j’ai perdu mon ami, le père de mes enfants, l’amour de ma vie. MAIS deux familles ont retrouvé la joie de vivre grâce a sa générosité et à la volonté qu’il avait eu, de son vivant, de se positionner en faveur du don d’organes. La carte de donneur nous a aidés.
Elodie, mars 2019